18 décembre 2007
En pleine organisation, le ministère de Brice Hortefeux verra véritablement le jour le 1er janvier 2008.
Avec son nouveau ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale, et du Codéveloppement, Nicolas Sarkozy s’est taillé un outil à la mesure de sa politique d’immigration. Afin de constituer, au 1er janvier 2008, une administration centrale rassemblant 600 personnes, Brice Hortefeux a pioché parmi divers ministères : Intérieur, Emploi, Affaires étrangères. Une réorganisation accélérée qui provoque la grogne des fonctionnaires.
«L’idée est que toutes les personnes qui s’occupent de l’immigration du début à la fin tombent sous le même mandat, explique un haut fonctionnaire. Cela va dans le sens contraire de ce qui se fait dans les autres Etats membres qui attachent l’immigration soit au ministère de la Justice, soit à celui de l’Intérieur.» Au sein des 27, seuls deux pays ont un ministère entièrement dédié à l’immigration : la Suède -ministère des Migrations- et le Danemark -ministère pour les Réfugiés, les Immigrés et l’Intégration. La Finlande et le Luxembourg font, eux, figurer l’immigration dans l’intitulé d’un autre ministère -Affaires étrangères ou européennes.
Rébellion des inspecteurs du travail
Cette réforme administrative a provoqué quelques remous, notamment à la direction générale du travail mise à la disposition du ministère de l’Immigration. Considérant que l’indépendance des 1 400 inspecteurs du travail était menacée, quatre syndicats ont déposé un recours. Le 14 novembre 2007, le Conseil d’Etat leur a donné tort.
Selon Luc Beal-Rainaldy, secrétaire national de la Snutef-FSU, l’un des syndicats requérants, le travail des immigrés sans-papiers ne représente que 15% des situations de travail clandestin constatées. «Nous craignons que le ministère de l’Immigration donne des ordres d’inspection ciblées sur la lutte contre le travail des immigrés illégaux, explique-t-il. Contrairement aux inspecteurs du travail, la police a besoin de l’autorisation d’un juge pour entrer dans une entreprise. Nous servirions d’ouvre-boites à des fins répressives.» Le 11 décembre 2007, les quatre syndicats ont déposés un préavis illimité de grève : «A compter du 17 décembre, ce préavis protège les inspecteurs qui refuseront les contrôles exigés par le ministère de l’Immigration.»
Confusion entre asile et immigration
Autre changement majeur, l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides -Ofpra- passe de la tutelle du ministère des Affaires étrangères à celle du ministère de l’Immigration. Un vieux rêve de Nicolas Sarkozy qui avait déjà tenté en 2003, alors ministre de l’Intérieur, de prendre le contrôle de l’Ofpra. La future administration centrale comporte une entité distincte, exclusivement dédiée à l’asile et aux réfugiés. Mais Brice Hortefeux a beau jurer que «l’asile n’est pas et ne sera pas une variable d’ajustement de la politique d’immigration», les associations d’aide aux demandeurs d’asile et aux réfugiés restent inquiètes. «Ce rapprochement risque d’accentuer la confusion entre la gestion des flux migratoires et la protection des personnes menacées de persécution», souligne l’association lyonnaise Forum Réfugiés.
Louise Fessard et Julie Algré à Paris