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Une chef de coeur

26 septembre 2014

Le C(h)œur des femmes du Neuhof a fait sa rentrée jeudi 25 septembre. Créé en 2011, ce rendez-vous musical réunit les femmes du quartier, pour la plupart d'origine manouche. Dans le rôle du chef, Anne Huber, chanteuse professionnelle, qui porte ce projet depuis sa création.

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Anne Huber est chanteuse professionnelle depuis 25 ans. Elle joue également du piano et de la guitare.  Photo : Laurine Personeni

Sitôt la porte franchie, elle se dirige droit vers le piano, environné de la lumière rasante des rayons du soleil automnal. Ses doigts volent sur les touches noires et blanches. « C'est bon, il marche, se rassure t-elle. Ça fait depuis juin que je ne suis pas venue dans cette salle. »

Cette salle du centre culturel Django Reinhardt, c'est le lieu de rencontre du C(h)œur des femmes , dans lequel Anne Huber officie comme professeur de chant depuis 2011. A cette époque, elle est approchée par Mandino Reinhardt, guitariste et parrain du C(h)oeur des femmes. Il lui propose de rejoindre le projet et de le mener à bien. « Diriger un chœur, c'était pour moi un domaine inconnu, confie la Strasbourgeoise de 48 ans. Mais il y avait aussi l'attrait de nouveaux horizons musicaux. Et surtout ce qui m'intéressait, c'était cette rencontre avec les femmes du quartier et les partenaires sociaux. » Car le C(h)œur des femmes compte en réalité deux ensembles, qui travaillent sur le même répertoire et se retrouvent lors de grandes répétitions.

« Au Neuhof, il y a une émulation, une force incroyable se dégage. On partage, on discute de la vie, on est à l'écoute », témoigne Anne Huber. Dans le C(h)oeur des femmes, les barrières sociales tombent, l'échange n'est pas unilatéral. « Comme on travaille des chansons manouches, les femmes m'enseignent ce que ça veut dire », s'enthousiasme-t-elle.

L'instinct de la musique

Avec cette passionnée de musique, pas de solfège ni de dictée de notes, tout se joue à l'oreille avec seulement l'instinct de la musique. De Syracuse d'Henri Salvador à La chansonnette d'Yves Montand, Anne Huber arrange « à sa façon » les standards de jazz. « Au fil des années, j'élève le niveau », souligne-t-elle. Au départ, la majorité des femmes ne connaissaient rien à la musique, mais « elles se sont accrochées, constate fièrement leur professeur. Comme on dit, le bon vin se fait avec le temps. C'est en travaillant, en ayant une rigueur, en s'engageant, en se passionnant qu'on y arrivera. »

Autant de mots qui reviennent dans la bouche d'Eric Faure, un des deux hommes choristes dans l'ensemble des partenaires sociaux. « Avec Anne, il ne suffit pas de tenir la note, il faut rythmer, avoir le souffle. » Il considère les répétitions avec Anne Huber comme un « moment de respiration ». « Je me suis rendu compte que je ne savais pas chanter, maintenant, je sais ce qui ne va pas. » Pour lui, l'aspect le plus décisif dans la personnalité de son chef de chœur est sa capacité d'adaptation « phénoménale ». « Anne est capable de réécrire une partition si elle sent que ça coince. Elle a le souci d'harmoniser, admire-t-il. Elle m'a énormément donné confiance en moi. C'est une vraie école de la vie », conclut-il, plutôt fier de sa tournure. 

 

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Gerania (à gauche) et Anne Huber lors de leur première répétition, jeudi 25 septembre, au Centre culturel Django Reinhardt. Photo : Laurine Personeni

Gerania, jeune choriste de 20 ans, témoigne aussi de son admiration pour sa professeure. Passionnée de chant depuis ses 5 ans, la jeune femme sent qu'elle peut aller plus loin encore aux côtés d'Anne Huber. « Elle veut vraiment qu'on réussisse, elle s'investit beaucoup », raconte celle qui a découvert le C(h)oeur des Femmes en 2012 par sa tante, elle-même choriste. « C'était assez nouveau, convient-t-elle. Mon univers, c'est plutôt Mariah Carey ou Céline Dion, pas vraiment le jazz. C'est plutôt un challenge. » Mais l'admiration est aussi du côté de la professionnelle. « Gerania fait partie de ces choristes qui ont des voix magnifiques, brutes. La découverte de choses qu'elles ne connaissaient pas renforcent leur don, ça procure énormément de plaisir », sourit-elle.

Bientôt rejointe par Gerania, Anne Huber entonne un air de jazz. La voix de l'élève se met au diapason de celle de son chef de chœur et de cœur. Ensemble devant le piano, leurs voix profondes se mêlent, des sourires se lisent dans leurs yeux.

Laurine Personeni

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