Parmi les premières plombières de Jordanie, Tahani Chatti a fondé la Coopérative des femmes plombières pour enseigner les rudiments de son métier aux femmes. Un engagement pour leur indépendance et pour lutter contre le manque d’eau dans le pays.
« Les femmes sont capables de tout faire, il faut juste leur laisser une chance. » C’est la conviction de Tahani Chatti, l’une des premières plombières de Jordanie. Et pour donner leur chance aux femmes, elle a fondé en 2014 la Coopérative des femmes plombières, une association qui les initie aux rudiments du métier. Cette vocation, elle l’a trouvée par hasard en 2011 alors qu’elle avait 27 ans. « Il y avait une formation dans mon quartier, j’y suis allée par curiosité, et j’ai adoré. » Ce qui lui a plu par-dessus tout, c'est la nouvelle vie qui s'offrait à elle.
Comme de nombreuses femmes jordaniennes, Tahani Chatti a été mariée contre son gré à 15 ans et était destinée à une vie de femme au foyer. Un carcan qui étouffait cette mère de quatre enfants. « Je devais toujours demander à un homme quand j’avais besoin de quelque chose et j’avais peur de m’éloigner à quelques kilomètres de chez moi » , se souvient-elle.
Elle trouve néanmoins du soutien chez son mari et se lance dans une formation de plomberie. Un choix qui détonne et qui lui vaut des critiques de la part de certains membres de son entourage. Dans le milieu de la plomberie aussi, cet engagement a attisé les remarques sexistes : « Les femmes veulent mettre leur nez partout et nous voler notre travail » , raconte-t-elle. Certains plombiers allaient même jusqu’à lui demander : « Comment tu vas retrouver les tournevis dans ton sac à main ? Tu es sûre que tu arriveras à porter ta boîte à outils ? »
« Je n’ai plus besoin de demander l’avis de mon mari »
Non seulement elle porte elle-même sa caisse à outils, mais elle est même devenue indépendante financièrement. « Maintenant, avec mon argent, je peux acheter ce que je veux et quand je passe la porte de la maison je n’ai plus besoin de demander l’avis de mon mari. » Tahani Chatti voit le travail comme un moyen d'émancipation et veut donner l’exemple à ses trois filles. On me disait : « Elles ont suivi toutes les formations de l’association et je veux absolument qu’elles finissent leurs études pour avoir le choix », revendique la plombière.
Au-delà de cet engagement en faveur des femmes, Tahani Chatti participe aussi à améliorer l’accès à l’eau en Jordanie. L’existence de plombières permet d’intervenir plus rapidement puisque selon les normes sociales locales, un homme ne peut pas rentrer dans un foyer sans la présence d’une figure masculine de la famille. Une fois formées, les femmes peuvent aussi réparer elles-mêmes les fuites de leur maison.
Tahani Chatti souhaite que ses filles puissent choisir leurs domaines d'activités. © Pauline Beignon