« On enregistre les plus grosses pertes dans les industries textiles, le meuble, l’imprimerie, la chimie, la sidérurgie, le papier, la fabrication de machines », décrit Laurent Davezies, spécialiste en économie et développement des territoires, dans son dernier livre, La Crise qui vient, la nouvelle fracture territoriale. Il est frappant de voir à quel point cette analyse de la situation de l’industrie française traditionnelle, la plus touchée selon lui, colle au paysage vosgien.
Avec le tarissement des finances publiques, Davezies prévoit un accroissement des inégalités et une fragilisation des territoires les plus vulnérables. La seule issue ? « Le redressement productif ». Dans les Vosges, la diversification de l’économie s’ajoute à ce premier défi pour mettre fin à une crise qui ne semble pas vouloir s’arrêter.
L’histoire économique des Vosges est fortement liée à celle de son industrie.
Le territoire dispose d’atouts naturels, le bois et l’eau, qui ont favorisé l’implantation précoce d’industries traditionnelles : meuble et verre dès la fin du XVIIe siècle, textile dès 1830, sidérurgie et papier à partir des années 1850. L’agriculture a toujours été moins importante que dans les autres départements ruraux, à cause des montagnes qui ont donné le nom au département, les Vosges, et qui occupent le tiers est du territoire. Après des années de période faste, connaissant une apogée dans les années 1960, le territoire est en difficulté. Depuis le premier choc pétrolier de 1973, l’industrie vosgienne a été marquée par une série de crises successives ayant entrainé des pertes d’emplois et des fermetures d’usines emblématiques : le site Boussac à Thaon-les-Vosges, la filature de Laveline-devant-Bruyères, le site Malora à Fraize, etc.
L’industrie vosgienne a connu au moins 55 plans de suppression d’emplois entre 2008 et aujourd’hui. En tout, 3309 salariés ont perdu leur travail. Nestlé-Waters, à Vittel, a détruit 600 postes. Novacare à Laval-sur-Vologne et Faurecia à Nompetalize ont respectivement réduit la voilure de 189 et 150 emplois. Les 1063 embauches, notamment par KDG Energy à Saint-Dié-des-Vosges (150) et Pavatex (100), ne suffisent pas à préserver les Vosges d’une hausse massive du chômage. Sur cette période, l’industrie a perdu 2157 postes.