15 mars 2012
Alors que le Conseil s'apprête à renouveler et étendre le mandat d'Eunavfor Atalanta, l'opération anti-piraterie maritime de l'Union dans l'Océan Indien, le Parlement européen a débattu mercredi avec Andris Piebalgs, commissaire au développement, des moyens d'améliorer son efficacité. Un débat rendu plus sensible en raison de la détention par l'Inde de deux soldats italiens de l'opération militaire européenne engagée dans cette lutte au large des côtes de Somalie.
Une absence remarquée de Catherine Ashton
L’absence de Catherine Ashton n’a pas manqué de soulever les interrogations des députés, notamment italiens. Plusieurs d’entre eux ont réclamé des explications sur l’action de la Haute représentante de l’union pour les affaires étrangères pour la libération de Massimiliano Latorre et Salvatore Girone. Les deux soldats italiens seraient responsables de la mort de pêcheurs indiens, pris pour des pirates, alors qu’ils assuraient la sécurité d’un pétrolier. Ils sont retenus par les autorités indiennes depuis le 15 février. "Il faut tirer les leçon de cette affaire pour que cela ne se reproduise plus" a convenu le commissaire au développement Andris Piebalgs.
Une mission aux effectifs réduits
La mission Atalanta vise à protéger un axe stratégique majeur pour l'approvisionnement pétrolier de l'Europe. A la veille de sa prolongation jusqu'en 2014, les députés ont déploré que sa flotille se soit largement réduite : des 35 navires de guerre initialement déployés en 2008 dans le Golfe d’Aden il n'en reste que 3. En novembre dernier, le général suédois Hakan Syren, qui préside le comité militaire de l'UE, avait averti que "l'exigence minimale" de 4 à 6 bâtiments pour mener à bien la mission européenne ne serait pas atteinte lors de la période allant de décembre 2011 à mars 2012. "Le nombre de navires sera en dessous de la ligne rouge", avait-il prévenu.
Cette réduction n’affecte pas son efficacité, a plaidé le commissaire, qui a rappelé que le nombre d’attaques avait néanmoins baissé. « 80% des prises de pirates sont réalisées par l’OTAN. L’UE a des ambitions militaires, mais peut-être devrait-elle laisser faire ceux qui savent faire », s'est exclamé M. Van Orden de l’ECR, opposé depuis le début à cette opération armée sous bannière européenne.
Pour le PPE et l'ALDE, les moyens maritimes doivent s’accompagner d’interventions ciblées au sol, mais dans le cadre d’une action internationale. L’intervention armée doit être soutenue par une législation internationale permettant la poursuite en justice et la détention des pirates interpellés. «Les pirates arrêtés sont aujourd’hui relâchés faute de base juridique. Et ils recommencent. », constate Nathalie Griesbeck, une député de l'ALDE.
C’est aussi les mouvements financiers issus des rançons extorquées par les pirates qui ont été épinglés, avec une volonté de poursuivre les banques participant au blanchiment de ces activités. « Il faut agir, et vite, face à ce défi. Plus de 400 marins sont retenus en Somalie par des pirates », rappelle un député socialiste, Saïd El Khadraoui.
Pour une députée socialiste, Maria Eleni Koppa, « Il faut revoir les axes de l'aide au développement, mais sur la base d’une meilleure information sur les acteurs locaux afin de mieux cerner les enjeux. » Un parlementaire PPE, Georgios Koumoutsakos, a souligné que le trafic dans le Golfe d'Aden, où transitent chaque jours trois millions de barils de brut par jour, est « très profitable pour les pirates ».
Si les modalités de l'intervention militaire font débat, le versement d'aides européennes au développement en Somalie, d'un montant de près de 415 millions d'euros répartis de 2008 à 2013, continue à rencontrer le soutrien l’unanime des différents groupes politiques. Une palette d'aides financières a été déployée pour aider ce petit pays miné depuis 20 ans par l'instabilité politique et économique.
Le Parlement devrait être formellement consulté sur ces questions lors d'une prochaine session.
Clémence Mermillod