Membre de la nouvelle association Strasbourg galeries et art contemporain, la gérante révèle les aspects insoupçonnés de son métier.
A son compte depuis 2020, la galeriste d'art Sandra Blum met l'accent sur l'émotion et les liens humains derrière son métier. Lisa Delagneau
« Je ne cherche pas l’artisanat, j’aime les techniques avec une excellence de travail, une répétition de traits visible. » Dans la galerie d’art de Sandra Blum, pas de support déterminé, mais « des techniques remarquables ». « Un travail fastidieux, long, précis, c’est ce qui me touche », raconte-t-elle, passant en revue quelques planches posées sur l’ancien parquet verni. Assise à son bureau, au premier étage d’un immeuble de la rue des Charpentiers, à Strasbourg, elle pose les yeux sur l’immense photographie qui lui fait face. Un cliché de Tina Merandon, dont l’exposition ouvre ce vendredi. Sa galerie, qui porte son nom, fait partie de l’association Strasbourg galeries et art contemporain, créée cet été 2023 avec une quinzaine d’autres lieux. Le but, entre autres : faire découvrir le métier de galeriste, dont on ignore bien souvent le quotidien.
« De l’extérieur, on se dit qu’on est derrière notre bureau dans la galerie et qu’on attend que le client passe avec notre petit costume-cravate ou notre petite robe noire. En fait, c’est peut-être 0,1% de ce qu’il se passe », ironise Sandra Blum. Passée par une faculté d’histoire de l’art et une école de commerce, elle a d’abord travaillé en tant que salariée en galerie d’art, avant de se mettre à son compte en 2020.
En réalité, l’organisation des expositions n’est que la face émergée de l’iceberg des galeristes. « Quand on décroche une expo avec un artiste, il faut continuer à le montrer ensuite. On essaie de le proposer à d’autres galeries, dans des salons », poursuit la Schilikoise. Être galeriste, c’est aussi accompagner les créateurs, les valoriser. « Il faut en moyenne cinq ans pour qu’un artiste marche, révèle Sandra Blum. Il faut le montrer régulièrement pour que la confiance des collectionneurs et amateurs d’art s’installe. S’il n’y a pas de travail de fond en dehors des expos, ça ne sert à rien. »
Artistes, clients, œuvres, une histoire de confiance
Outre la crédibilité que la galerie apporte aux artistes, les clients doivent aussi être soignés. « Parfois, on fait des erreurs. On expose des choses qu’on aime beaucoup, on estime que ça va bien fonctionner, et on se plante complètement », sourit la quinquagénaire, installée ici depuis 2021. « C’est un rapport de confiance : certains vont se laisser guider par les galeristes parce qu’ils savent qu’on ne va pas leur proposer n’importe quoi. » Pour Sandra Blum, un impératif dans sa sélection d’œuvres : « Montrer des choses qu’on est susceptibles d’accrocher chez nous. Si on ne peut pas apprécier l’œuvre, c’est difficile de la défendre, on ne vend pas des voitures. »
Travailler dans l’art, c’est avant tout une affaire d’émotion pour elle. Une émotion qui se ressent lorsqu’elle parle de son métier : « On est dans un rapport intime avec les artistes, les clients potentiels, l’œuvre. D’ailleurs, si on donne notre nom à nos galeries, ce n’est pas parce qu’on a un ego surdimensionné, c’est parce que l’amateur d’art ou le client potentiel aime voir l’humain qui est derrière. »
« Ça fait peur d’entrer dans une galerie »
Ces clients potentiels, il faut aussi aller les chercher. Un des nombreux métiers insoupçonnés des galeristes : la communication. « Ça fait peur d’entrer dans une galerie. On peut se dire que c’est cher, pas accessible, qu’il faut forcément acheter tout de suite, qu’on ne va pas être à la hauteur, admet Sandra Blum, qui propose des œuvres valant entre 100 et 5 000 euros environ. Mais nous on est là pour expliquer ce que font les artistes, ouvrir le regard, proposer des choses. Moi j’accueille tout le monde de la même façon. »
Lever les freins qui empêchent le public de pousser les portes des galeries d’art, c’est aussi le but du Strasbourg galeries tour. L’événement, porté par la toute récente association de galeries, est proposé pour la cinquième fois dans la capitale européenne. Une quinzaine de galeries contemporaines, dont celle de Sandra Blum, seront ouvertes de concert ce week-end, dès vendredi soir.
Lisa Delagneau
Édité par Julie Lescarmontier