Lors de leur Congrès à Strasbourg, les Régions de France ont signé une convention de soutien à leurs homologues ukrainiens. Malgré leur échelle réduite, les collectivités locales font valoir leurs leviers pour participer à l’aide internationale.
Tetiana Yehorova Lustenko, présidente de l’oblast de Kharkiv et de l’Uaror, représentait au Congrès l’échelon régional ukrainien. Photo : Yanis Drouin
Au déclenchement de l’invasion russe en Ukraine le 24 février 2022, un élan de solidarité général s’est emparé des pays occidentaux. En France, les collectivités locales n’y ont pas échappé. Plus de deux ans après son accord conclu avec l’oblast (région) de Kharkiv, le Grand Est accueille une délégation ukrainienne au Congrès des régions, organisé cette année à Strasbourg. À cette occasion, un accord a été signé entre Régions de France et l’association ukrainienne des Conseils de District et de Régions (Uaror) pour formaliser la solidarité qui unit les deux entités. " Le but, c’est que chaque région française soit en partenariat avec une région ukrainienne, explique à Webex Christian Debève, le vice-président LR aux relations internationales du Grand Est. Pour l’instant, c’est le cas de cinq d’entre elles."
Tetiana Yehorova Lustenko, présidente de l’oblast de Kharkiv et de l’Uaror, représentait au Congrès l’échelon régional ukrainien. Elle est intervenue au sein d’une table ronde sur le thème " s’engager pour l’Ukraine en soutenant les Oblast ", à laquelle étaient présents des centaines de spectateurs dont Webex. Elle a plaidé l’aide à la reconstruction dont les collectivités ont besoin après les bombardements à répétitions qu’elles ont subi et qu'elles subissent encore. Les infrastructures, principalement énergétiques, font parties des cibles privilégiées de l’armée russe, contraignant les oblasts à de régulières réparations et reconstructions.
Franck Leroy, président LR de la région Grand Est et mandaté par Régions de France pour coordonner l’aide à l’Ukraine, revient de Kharkiv. " Lors d’une réunion avec Carole Delga (présidente socialiste de Régions de France, ndlr) et Tetiana Yehorova Lustenko, nous avons commencé à échanger sur les besoins effectifs des oblasts. " Il relève qu’à proximité du front, les besoins se concentrent sur des abris et du matériel scolaire en remplacement de celui détruit. Les régions ne disposent pas d’armement et n’ont pas le droit d’en financer, elles se concentrent naturellement au soutien aux civils.
"Les collectivités n’ont pas d’action internationale mais des actions à l’internationale, précise Christian Debève. Nous n’avons pas de compétences régaliennes, mais dans le cadre de la coopération décentralisée, nous pouvons intervenir auprès de régions à l’étranger." Dans l’oblast de Kharkiv, le Grand Est intervient essentiellement dans la construction d’abris, l’accès à la santé dans les communes rurales dont les médecins généralistes ont été mobilisés et l’aide à l’enfance. "Après 2 ans de Covid et 2 ans de guerre, une partie des enfants n’est plus à l’école et est isolée, se désole l’élu. Nous leur offrons des séjours de répit. Encore mardi dernier, on vient d’en accueillir 40."
L’échelon de l’hyperréactivité
Plus loin du front, la reconstruction est déjà en marche. " Nous pouvons organiser avec nos entreprises le transfert de technologies pour rétablir leurs infrastructures ", évoque le président de la région Grand Est. « Les régions au centre et à l’Ouest sont aussi importantes que celles proches de la Russie, insiste Tetiana Yehorova Lustenko, originaire de la ligne de front, car elles accueillent les populations déplacées. " Au second anniversaire du conflit, 3,7 millions d’Ukrainiens étaient déplacés à l’intérieur du pays.
Depuis le début du conflit, la région Grand Est a versé plus de 500 000 euros dans différentes actions d’aide à l’Ukraine et aux pays voisins. Dès le début du conflit, des camions et wagons de marchandises y ont été acheminés. Les régions de Voïvodie Lubelskie (Pologne) et de Vysocina (République Tchèque), frontalières de l’Ukraine, ont ainsi reçues 100 000 euros d’aide pour la gestion des réfugiés. Une autre dotation de 100 000 euros a permis d’équiper sept communes de l’oblast de Kharkiv de 20 générateurs électriques et de 25 unités de traitement de l’eau.
Si ces sommes semblent relativement réduites par rapport aux 200 millions d’euros promis par la France en juin pour la reconstruction du pays, les collectivités jouent la carte de la proximité. " Les communes, c’est l’hyperréactivité, défend David Lisnard, maire de Cannes et président LR de l’association des maires de France. Dès le 26 février 2022, deux jours après le début de la guerre, nous avions organisé une collecte de matériel. " L’échelon local permet ainsi de faire intervenir plus aisément les acteurs de proximité, dans le cas de la collecte faite par les communes ou de la mobilisation des entreprises par la région.
Yanis Drouin
Édité par Anna Chabaud