La librairie Obscurae a ouvert le 8 février dernier, jour de la naissance de Jules Verne, l'auteur favori d’Antoine Gateau. Le gérant de la boutique spécialisée compte bien partager sa passion pour l’imaginaire à travers sa boutique.
Antoine Gateau, ancien garde forestier, s'est reconverti sur le tard pour embrasser une passion d'enfance : la « littérature de l’étrange ». © Tara Abeelack/Cuej.info
« C’est un peu la librairie que j’aurais aimé avoir plus jeune près de chez moi. » Le choixpeau magique de Poudlard trône en haut d’une étagère, une sculpture de visage ricanant sépare deux tomes de l’américain Stephen King et une grande horloge dans la veine steampunk égrène les secondes derrière le comptoir. Rue Munch à Strasbourg, Antoine Gateau vit « un rêve d’adolescent », entouré de ses 4000 ouvrages mêlant science-fiction et horreur. À 47 ans, cet ancien garde-forestier à l’Office national des forêts a rangé ses bottes au placard pour se plonger dans le monde des livres. À Strasbourg, où se côtoient plusieurs boutiques spécialisées en mangas et polars, il manquait tout de même une référence en matière de « littérature de l’étrange ». Avec Obscurae, le public peut maintenant se donner rendez-vous aux rayons fantasy, hantise ou encore ufologie, une discipline qui se rapporte aux ovnis. « Je ne propose pas que du divertissement, il y a aussi des ouvrages plus sérieux avec par exemple des analyses universitaires qui prennent des textes sous le prisme historique ou politique. »
Un lectorat à attirer
Si le libraire novice sait qu’il pourra majoritairement s’appuyer sur un public fidèle et avisé déjà amateur de grands évènements comme le Festival européen du film fantastique de Strasbourg, il espère attirer une frange de lecteurs plus habitués à entendre parler des œuvres par le biais du cinéma et des séries télévisées, à l’instar des récents Sandman ou Les anneaux de pouvoir qui explorent le monde créé par Tolkien : « On pense que la littérature de l’imaginaire est une sous-culture, or elle domine actuellement. » Le gérant cherche à tordre le cou à certaines idées reçues qui renverraient dos-à-dos la littérature blanche, ou classique, à une littérature peuplée de créatures fantastiques, jugée plus « légère ». « Jules Verne fut ma première lecture. Et on l’a vu, ce fut un précurseur. Ses textes sont bien écrits, il y a un vocabulaire détaillé, une documentation importante », souligne celui qui rêve par ailleurs d’inviter Maxime Chattam. Antoine Gateau mise sur la richesse de son catalogue, mais aussi sur la particularité de ses lieux « accueillants, mais qui sortent de l’ordinaire ».
Le libraire en herbe n'a pas hésité à décorer chaque recoin de la boutique. ©Tara Abeelack/Cuej.info
Strasbourg, « une ville riche en imaginaire »
Chaque recoin regorge de symboles, d’affiches et de petites statuettes lovecraftiennes qui font voyager les lecteurs dans des contrées imaginaires. Dans la vitrine, chaque tentacule de la pieuvre sculptée dans du métal de récupération attire l’œil sur une œuvre. Une chouette et un sorcier du même artiste breton Métal Hirsute accueillent le lecteur une fois passé la porte. Un décor qui s’inscrit bien à Strasbourg, « une ville gothique et riche en imaginaire ». Antoine Gateau, originaire de la Nièvre mais ayant travaillé 24 ans à Grendelbruch près de Schirmeck, s’est associé à des maisons d’édition locales comme Les éditions Caurette pour valoriser la culture locale. « Je voulais apporter quelque chose de complémentaire par rapport aux autres librairies du quartier », assure le libraire passionné par l’urbex, le street art et le heavy metal. Pour l’heure, les retours des premiers curieux sont positifs et témoignent de la demande croissante du lectorat qui rêve d’évasion et de mystère, « surtout depuis que le monde est plus sombre » souligne Antoine Gateau.
Tara Abeelack
Édité par Nils Hollenstein