L’Olympique de Marseille reçoit Nice ce mercredi à 21 heures, de nouveau à huis-clos, pour le plus grand bonheur de Jacques-Henri Eyraud. Le président olympien mène une guerre ouverte contre ses supporters, au risque de voir l’âme du club en pâtir.
Jacques-Henri Eyraud, le président de l'Olympique de Marseille depuis 2016. © Stephen McCarthy/Web Summit via Sportsfile - Creative Commons
Parcourez les stades à travers l’Europe et vous le saurez : partout, l’ambiance proposée par les supporters de l’OM est considérée, respectée, admirée. La ferveur qui descend des virages (les tribunes derrière les buts) a déjà porté l’équipe vers d’épiques succès. En avril 2018, c’est aussi grâce à ses supporters que la formation a pu renverser des montagnes et atteindre la finale de l’Europa League (la « petite » Coupe d’Europe), malgré un scénario mal engagé. Pour tout supporter de l’OM, venir au Vélodrome a valeur de pèlerinage.
Mais depuis l’arrivée de Jacques-Henri Eyraud à la présidence du club (en 2016), ce patrimoine immatériel est en danger. Diplômé d’Harvard, lui n’a que faire de cette histoire. Le PDG (comme il se présente sur LinkedIn, son réseau favori) est prêt à déplaire pour imposer ses idéaux libéraux. Pour ce macroniste convaincu, le club phocéen doit être géré comme une entreprise. Exit les employés supporters, pas assez productifs les lendemains de défaite. Les fans de l’équipe, justement, sont relégués au rang de clients. Leur venue au stade est désormais une expérience, et les effets de lumières sont prioritaires sur une politique sportive cohérente.
Surtout, Eyraud méprise une ville dont il ne comprend pas la folie et veut abattre les supporters les plus fervents, jugés trop contestataires. Un groupe historique (les Yankees) a déjà été privé de stade ; les autres sont en sursis depuis une mise en demeure adressée cette semaine. Mais bonne nouvelle, le club a une idée pour "réconcilier" les supporters : OM Agora. De quoi contourner les associations et imposer aux supporters la façon de suivre son équipe. Une insupportable idée paternaliste, aux relents de lutte des classes. La bourgeoisie dirigeante compte imposer sa façon d’agir aux supporters prolétaires, pour lesquels le stade représente un des derniers lieux d’expression libre.
Il y a dix jours, Libération se demandait en une si le foot était encore un sport populaire. Une chose est sûre : il ne le sera plus très longtemps si les idées du président marseillais deviennent la norme.
Arthur Massot