10 mars 2016
L’exploitation des mégadonnées (big data) représente un enjeu économique important pour l’avenir de l’Union européenne. Garantir la compétitivité du marché européen tout en assurant la protection et l’anonymat de la population constituent donc deux des priorités de la résolution votée par le Parlement européen.
« Les retombées positives d’une économie fondée sur les données entraineront une croissance supplémentaire de 1,9% du PIB d’ici 2020 » selon la proposition de résolution adoptée jeudi 10 mars par le Parlement européen.
Achats sur internet, habitudes de consommation... toutes ces données laissent des traces enregistrées sur des serveurs informatiques. La collecte, le stockage, l’analyse et l’exploitation des milliards de giga-octets d’information collectés par nos machines représentent un enjeu important pour l’avenir de l’économie numérique. Ces nouvelles perspectives nécessitent néanmoins des aménagements juridiques dont le Parlement prend acte dans le texte adressé au Conseil et à la Commission européenne.
De nombreux usages envisagés pour ces données
Le marché des données numériques concerne une multitude d’acteurs économiques et institutionnels. Le bureau de l’eurodéputée Barbara Kappel, ENF (extrême droite), rapporteure sur la résolution d’actualité « Vers une économie de la donnée prospère », indique que ce dossier sera donc sans doute traité à travers plusieurs textes.
L’exploitation de ces mégadonnées collectées (couramment appelées big data) a de nombreuses applications possible : institutionnelle, médicale, agricole ou industrielle. Thierry Burger-Helmchen, doyen de la Faculté des Sciences économiques et de gestion à l'Université de Strasbourg, explique que l’analyse de ces données va par exemple « avoir un vrai impact sur le fonctionnement des entreprises. Ces données permettent de faire des prévisions de vente, de savoir combien passer de commandes. Il s’agit d’une application extrêmement positive de la donnée : réduire les déchets, la surproduction… ».
Un enjeu économique qui nécessite des aménagements
Alors que les sociétés sont de plus en plus connectées, la proposition démontre la nécessité de mettre en place un cadre législatif sur la collecte, l’utilisation, la protection et l’accès à ces données. L’enjeu étant à la fois de protéger les consommateurs et de favoriser le développement, la recherche et l’innovation sur le marché des mégadonnées.
« La plus grande crainte de la population, c’est d’être espionnée » rappelle le bureau de la députée Barbara Kappel. Mais dans l’exploitation des données, l’usager est en théorie anonymisé au milieu des milliers de données collectées. Il s’agit néanmoins de mettre en place un cadre législatif qui assure cet anonymat et protège les individus.
Du point de vue économique, il est également question de contrôler les standards et de favoriser le développement des infrastructures et formations nécessaires. Face aux Etats-Unis qui bénéficient des ressources et de l’importance de grandes entreprises du secteur technologique, au premier rang desquelles le GAFA (Google, Amazon, Facebook et Apple), l’Europe mise notamment sur les nombreuses start-ups et PME innovantes. Sont par exemple envisagés des partenariats publics-privés, des incubateurs d’entreprise ou la création de clusters regroupant différents acteurs de l’économie de la donnée.
Des créations d’emplois à la clef
On estime que le marché des mégadonnées connaitra entre 2013 et 2017 une croissance six fois plus rapide que celle des technologies de l’information et de la communication (TIC) permettant la création de 3,75 millions de nouveaux emplois au niveau mondial. Pour que ces emplois trouvent preneurs, la formation est un enjeu clef, car ces métiers exigent des compétences techniques et théoriques importantes.
« Il faut être capable de collecter ces infos, puis de les stocker et de les traiter. Ce sont des étapes très différentes qui font appel à des compétences informatiques, économiques ou statistiques », rappelle le doyen Thierry Burger-Helmchen. « Les jeunes s’intéressent à ce domaine. Big data, numérique, ce sont des mots qui leur parlent même si les lycéens n’ont pas une vision claire de ce que c’est. »
La proposition de résolution, adoptée par les eurodéputés aujourd’hui, n’a aucune valeur contraignante. Il revient désormais à la Commission et au Conseil de l'Union européenne de faire des propositions pour développer la législation en la matière.
Juliette Buchez