06 février 2013
Les eurodéputés ont adopté mercredi deux rapports concernant la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Si le consensus est large sur les principes éthiques à respecter, les clivages portent sur le caractère volontaire ou obligatoire de leurs modalités d'application, et sur l'opportunité de les étendre aux PME de l'espace européen.
Tout groupes politiques confondus, l'hémicycle a souligné l'intérêt pour les entreprises de recourir à cet outil de gestion, qui mesure le respect de l'environnement (économies d'énergies, réduction des pollutions) et l'intensité de l'action sociale (encouragement au bénévolat, actions caritatives, amélioration des conditions de travail etc.).
"Les entreprises ayant pris en compte leur responsabilité sociale sont souvent les plus novatrices et ont la meilleure image", rappelle Antonio Tajani, commissaire européen à l'industrie et à l'entrepreneuriat. Pour Richard Howitt (S&D, Grande-Bretagne), un des rapporteurs, la non-application des pratiques de RSE serait même une des causes de la crise actuelle, en ayant brouillé l'image du monde de l'entreprise. Le manque de transparence financière de certaines entreprise est particulièremnt souligné. Il est donc "impératif de restaurer la confiance des européens dans les entreprises", a-t-il indiqué. Cela passe par des pratiques comptables incluant des normes sociales, que certains souhaitent définies dans un cadre législatif, et intégrées aux comptes financiers.
Volontariat ou cadre juridique ?
En 2011, la Commission en a proposé une nouvelle conception. Sur la base d'une approche exclusivement volontaire, elle définit la RSE comme "la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société", soutenue,, le cas échéant, par les autorités publiques. Elle met l'accent à la fois sur les instruments internationaux tels que les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales (recommandations pour une activité économique mondiale responsable) et les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme et sur le caractère multidimensionnel de la RSE dans leurs définitions. Elle énonce 18 priorités, qui vont des stratégies sectorielles jusqu'aux pratiques responsables de la chaîne d'approvisionnement.
Faut-il désormais, comme l'estiment certains députés, passer à un stade plus contraignant ?
Pour Richard Howitt (S&D), il est nécessaire que le respect des normes de la responsabilité entrepreneuriale soit "partie intégrante de la stratégie des entreprises" .
Evelyn Regner (S&D, Autriche) a même souhaité que la Commission propose un acte législatif sur les normes environnementales et sociales qu'elles doivent appliquer. Actuellement, seul un texte sur la transparence financière est prévu pour le mois de mars. Du côté des Verts, on est encore plus ferme. Comme l'a annoncé Malika Benarab-Atou (Verts, France), "mon groupe s'abstient de voter ce texte car il n'est pas mentionné l'urgence de rendre l'application des RSE obligatoire".
Les libéraux du groupe ADLE, par la voix de Nadja Hirsch (Allemagne), jugent que le respect des principes écologiques et sociaux représente "un avantage concurrentiel" qui relèvent du choix de l'entreprise et ne doit pas être rendus obligatoires. Même son de cloche au PPE. Pour l'allemand Thomas Mann : "Le volontariat doit rester la base de l'application des RSE." D'autant que toutes les entreprises ne sont pas à loger à la même enseigne.
Les PME au centre des attentions
Le débat s'est poursuivi sur le cas des petites et moyennes entreprises. Le document de la Commission de 2011 indiquait que la prise en compte des RSE par ces petites entreprises était plus "intuitif et informel". D'où la nécessité selon Antonio Tajani, commissaire à l'industrie et à l'entreprenariat de garder de la flexibilité dans l'application de ce code éthique. "Chacune doit agir selon sa situation spécifique". Et Rebecca Taylor (ADLE, Grande-Bretagne) de lui emboiter le pas : "Les petites entreprises ne doivent pas supporter de charges supplémentaires."
Pourtant, selon le rapporteur Raffaele Baldassarre (PPE, Italie), le tissu de PME, "épine dorsale de l'économie européenne", pourrait permettre une plus large diffusion des concepts liés aux RSE et donc, contribuer au retour de la confiance des Européens dans leurs entreprises. La Commission avait elle aussi souhaité dans sa communication de 2011 "améliorer la notoriété de la RSE" auprès des citoyens. "Se préoccuper des RSE est dans l'intérêt des entreprises elles-mêmes" assurait-elle.
Toutefois, Raffaele Baldassarre a concédé que ces rapports "ne règleront pas tout les problèmes du monde", d'autant que, comme il l'a souligné, l'action politique pour encrouager les RSE dans les petites entreprises reste "un domaine encore inexploré".
Maxime Mainguet