16 février 2017
Pour lutter contre les nouvelles menaces qui pèsent sur les Etats européens, une nouvelle législation anti-terroriste a été adoptée par les eurodéputés, jeudi 16 février, à Strasbourg.
Le 13 juin 2016, Larossi Abballa, ressortissant français, tuait deux fonctionnaires à Magnanville (78). L’homme avait préparé seul l’attaque après s’être radicalisé sur Internet. Il est ce que certains appellent un “loup solitaire”. Pour lutter contre ces nouvelles menaces terroristes, caractérisées par leur nature individuelle, les parlementaires européens ont adopté une nouvelle législation, jeudi 16 février. Comme l’a rappelé le commissaire européen à la sécurité, présent à Strasbourg, Julian King, il s’agit de contraindre les Etats « à disposer de règles minimales, applicables et appliquées, dans l’ensemble des pays membres. »
Tout acte préparatoire au terrorisme, y compris le recrutement, la formation, l’apologie ou encore le voyage à des fins terroristes, devra être érigé au rang d’infraction pénale. Les eurodéputés ont également prévu des dispositions spécifiques à la protection, l’assistance et le soutien des victimes de ces actes.
Des contrôles accrus aux frontières
Pour éviter les attentats terroristes commis par des ressortissants européens de retour d’une zone de combat, les eurodéputés ont, dans un autre texte, rendu obligatoire le contrôle d’identité et des documents de voyage, à chaque entrée et sortie de l’espace Schengen. Les papiers des voyageurs seront vérifiés grâce à des bases de données nationales mais aussi internationales ,notamment celles d’Interpol. L’eurodéputée roumaine Monica Macovei (ECR, conservateurs) l’a martelé en conférence de presse : “on veut pouvoir identifier et repérer les combattants étrangers”, ces hommes qui quittent leur pays et vont se battre auprès d’organisations terroristes étrangères.
Une législation sujette à controverse
Si les députés des principales forces politiques européennes se félicitent de ces nouvelles mesures pour lutter efficacement contre le terrorisme, cette refonte de la législation n’a pas fait l’unanimité au sein du Parlement. Les Verts comme la GUE ont voté contre. Pour Eva Joly (Verts/ALE) certaines de ces dispositions remettent en cause les libertés individuelles. Définissant le voyage à des fins terroristes comme une infraction pénale, “le simple fait de prendre un billet pour la Syrie” pourra être considéré comme “préparer un acte terroriste”pour l’eurodéputée.
Les eurodéputés de la GUE, quant à eux, redoutent que la législation sur le contrôle aux frontières extérieures de l’espace Schengen, soit inefficace. Afin d’éviter les délais d’attente trop longs, les enfants en bas âge ainsi que les personnes âgées ne seront par exemple pas contrôlés. Ces eurodéputés ont peur que dans la pratique ces exceptions deviennent la règle pour tous.
La balle désormais dans le camp des Etats
La rapporteure allemande de la directive, Monika Hohlmeier (PPE, centre-droit) a admis, en conférence de presse, s’être “largement inspirée du modèle législatif français, un pays européen pionnier dans la lutte antiterroriste”. Elle a également reconnu que l’application de la directive ne se fera pas de manière synchronisée dans l’ensemble des pays européens : “il y a des Etats membres qui ont peu d’expérience avec le terrorisme, l’harmonisation législative au niveau pénal va prendre du temps dans ces pays”.
Il reste désormais aux États à transposer ces mesures dans leurs droits nationaux. Ils sont les seuls à pouvoir décider d’intensifier leur collaboration en terme d’échange d’informations, notamment pour mieux contribuer à prévenir une attaque. Sur ce volet, ils rechignent cependant, encore souvent, à coopérer.
Sophie MOTTE et Saloua TAOURDA